On a les icônes qu'on mérite André Bellon Paris
30/07/2019
La visite de Greta Thunberg à l'assemblée nationale en dit plus sur l'état du Parlement que sur le réchauffement climatique.
Nous vivons un moment historique formidable. On ne doute pas de l'importance du défi climatique pour la nation et au-delà pour l'humanité. Mais c'est alors qu'intervient la petite bergère, personnage traditionnel des contes de fées, mélange de Cendrillon et de Bernadette Soubirou, qui rassemble au Palais Bourbon les députés de tous bords. Fallait-il cela pour éveiller la conscience nationale ? Greta Thunberg, sympathique personne, a soudain surgi pour expliquer à nos parlementaires, qui l'ignoraient ?, que la terre se réchauffe et qu'il faut se référer en la matière aux scientifiques du GIEC.
On s'étonnera que nos braves députés n'aient pas jugé utiles jusqu'alors de convier les scientifiques en question avec autant de solennité et de créer un large débat autour de leurs thèses, autour des causes du défi autant que des moyens d'y faire face. On s'inquetera, par exemple, qu'ils n'aient apparemment pas jugé utile d'auditionner Yves Coppens, le célèbre paléo-anthropologue, découvreur de Lucie, qui a longuement écrit sur les relations entre l'homme et le changement climatique.
Faut-il le rappeler ? Le rôle du député est de représenter et de décider au nom du peuple après un débat libre et raisonné, pas de servir de faire valoir aux Bernadette Soubirou des temps modernes.
On remarquera que la gentille petite Greta demande surtout que nous donnions, sans autre débat, notre intellectuelle obole quotidienne à la cause climatique, permettant ainsi aux parlementaires d'ignorer toute interrogation sur le mode de production et sur le système économique et social.
Ayant ainsi obtenu l'absolution de la sympathique innocence, les députés ont alors pu masquer leurs contradictions criantes, par exemple entre le larmoiement collectif et le vote quasi concomitant du Ceta, entre libre-échange et écologie.
De nos jours, les grands gestes d'émotion collective se substituent souvent au débat démocratique, permettant ainsi au système dominant de se perpétuer sans soulever de grande hostilité.

Sacré de Rugy!
On ne peut qu'être ravi devant le déferlement de critiques à l'encontre de François de Rugy. Son goût de parvenu pour les réceptions somptueuses et les palais de la République, sa propension aux dépenses excessives, étaient en effet peu compatibles avec la rigueur qu'il manifestait vis-à-vis des autres pour la moindre dépense.
On s'étonnera néanmoins du temps qu'il a fallu à tous ceux qui ont bénéficié de ses agapes pour s'en étonner. On s'étonnera surtout de la carrière fulgurante d'un parjure. Car enfin De Rugy avait juré publiquement et signé par écrit qu'il soutiendrait à la présidentielle celui qui serait élu par la primaire de gauche. Son reniement, loin de lui valoir des opprobres, lui a ouvert les chemins du pouvoir qu'il semble apprécier. Telle est la vie publique aujourd'hui.
Dans ce contexte, les remarques d'un Mirabeau ou d'un Robespierre méritent d'être rappelées. Le peuple peut pardonner certains errements des dirigeants lorsque la politique qu'ils mènent correspond aux vœux des citoyens. Mais lorsque cette politique leur est hostile, lorsque même la répression est la réponse aux revendications sociales légitimes, rien ne peut être pardonné.
